Isabelle
Sobotka
Désignez une production architecturale récente qui vous semble intéressante et expliquez pourquoi?
Imaginez un bâtiment qui, en fin d’usage, peut être entièrement démonté et dont tous les composants servent à construire un nouveau bâtiment. Des architectes l’ont conçu et des étudiants de l’EFP, le centre de formation en alternance, l’ont construit! Par trois fois, les mêmes matériaux ont servi à construire, utiliser puis déconstruire un bâtiment, chaque fois avec une volumétrie et une affectation différentes. Le projet BRIC, bâtiment durable, évolutif et réversible répond de manière ambitieuse aux enjeux climatiques actuels. Pas seulement grâce à une faible consommation d’énergie lors de son occupation, mais aussi grâce à une faible consommation de ressources lors de sa construction. Il a intégré les principes de circularité́ et de réversibilité́ tout en garantissant de hautes performances environnementales. Le réemploi, l'approvisionnement local en matériaux, l'autonomie énergétique, la gestion de l'eau pluviale sur la parcelle et la récupération des eaux grises ont été́ étudiés avec attention. Les résultats obtenus en terme de réduction de déchets sont époustouflants. Alors que le secteur de la construction ne réemploie que 1 à 2% de ses matériaux, le BRIC démontre qu’il est possible, grâce à la conception réversible, d’en réemployer plus de 95%!
Comment percevez-vous le contexte architectural à Bruxelles aujourd’hui?
Le secteur de la construction à Bruxelles consomme un tiers des ressources nécessaires à la Région. Et il produit un tiers de ses déchets non-ménagers. Ce modèle économique dit «linéaire» – qui consiste à extraire, produire, utiliser puis jeter – est dramatique non seulement pour l’environnement, mais également pour l’économie bruxelloise et l’emploi local car les étapes d’extraction, de production et de gestion des déchets se font principalement en dehors du territoire de la Région. C’est en cela que le modèle économique dit «circulaire» est une opportunité pour Bruxelles: et si Bruxelles, plutôt que de jeter ses ressources, les récupérait et les réemployait? Moins d’extraction de ressources naturelles et de production de déchets pour une relocalisation de l’activité et de l’emploi lié à cette activité: démontage (et non plus démolition), préparation au réemploi, nouvelles filières professionnelles pour le réemploi,… Aujourd’hui, 28 chantiers circulaires (lauréats be.circular) nous démontrent chaque jour qu’il est possible de récupérer des tonnes de matériaux et de les réemployer dans de nouveaux projets. Des entreprises ont changé de vision : elles ne voient plus ces briques, ces parois de bureau, ces isolants,… comme des déchets mais comme des ressources à ré-injecter dans des projets locaux. La circularité est en marche et ceux qui ont pris cette direction ne semblent pas prêts à faire marche arrière! à l’avenir? Concevoir le projet en pensant à la fin de vie du bâtiment où ses composants auront conservé leurs valeurs. à l’inverse des pratiques actuelles, on conçoit le bâtiment comme un gisement futur de ressources et non de déchets.
Présentez vous en quelques lignes.
L’économie circulaire, c’est faire évoluer notre monde en réduisant la consommation des ressources et la production de déchets. Architecte indépendante pendant 15 ans, j’ai construit mes projets sur ces bases. Et depuis 7 ans au sein de Bruxelles Environnement, cette expérience me permet de définir une vision concrète de ce qu’est l’économie circulaire pour les professionnels de la construction et de ce qu’elle peut apporter tant à l’économie de leur entreprise qu’à notre environnement. Je travaille également à les soutenir dans cette transition et à fixer avec eux les objectifs à atteindre dans ce domaine.